Airs d’opéra, danse contemporaine, musique africaine et quartiers Politique de la ville. Inutile de chercher un intrus dans la liste de courses de la Camionnette d’alimentation générale culturelle, qui a transporté la compagnie Alfred Alerte à travers Nevers, pendant deux jours aussi intenses pour les artistes que pour les spectateurs.
La voix de Catherine Manandaza s’élève sur le parvis de l’Espace Stéphane-Hessel, au milieu des immeubles de la Grande-Pâture. Une mamie glisse la tête à la fenêtre de son appartement, tend l’oreille pour écouter la soprano chanter Bach et Bellini à quelques mètres des bus et des voitures. Des gamins chaloupent à vélo ou ballon au pied, d’autres se coursent en caddie. Sur les gradins de béton, une cinquantaine de spectateurs de tous âges observent la diva dans sa robe de mousseline blanche, autour de laquelle tournoient lentement trois danseurs.
Un grand cercle de craie blanche au sol, un piédestal de bois, de grandes tiges de bambou : la scène minimaliste tient, avec les quatre artistes de la compagnie Alfred Alerte, dans la Camionnette d’alimentation générale culturelle, qui boucle ce soir-là une tournée express de deux jours dans les quartiers de Nevers. De centre social en centre social, de city stade en parking, de pelouse en esplanade, d’IME en Maison départementale de l’enfance et de la famille, l’estafette affrétée par la Maison (1) s’est arrêtée sept fois pour présenter une version réduite de Rites, le spectacle créé en 2019 à Bibracte par la compagnie installée à Authiou.
Pourtant rompu depuis 30 ans aux représentations jouées au plus près du public, Alfred Alerte sort de cette course à travers Nevers avec les yeux emplis de sensations neuves : « C’était notre premier spectacle depuis le Covid. L’émotion n’était pas la même, pour nous comme pour les gens. C’était complètement autre chose. On a joué ce matin devant des enfants, c’était comme s’ils découvraient la vie. On a vécu des moments vraiment bien. »
L’artiste, qui a joué au pied des tours franciliennes avant de s’installer dans la campagne nivernaise, aime montrer ses spectacles dans les quartiers populaires, où la danse contemporaine, les airs lyriques ou la musique d’Afrique de l’Ouest accompagnée au kamale ngoni (cousin de la harpe) ont rarement droit de cité : « Il y a toujours quelque chose qui reste de ces spectacles, dans les quartiers, et ça me touche énormément. »
Pour la Camionnette d’alimentation générale culturelle, la tournée neversoise tranche avec les itinéraires habituels des circonvolutions estivales – les villages et petites villes de la Nièvre : « C’est une demande de la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles, NDLR), qui souhaitait que l’on participe à l’Eté culturel et aux Vacances apprenantes », explique Rosemay Lejay, responsable des actions culturelles de La Maison. Plus que satisfaisant, le bilan de ces deux jours trépidants donne déjà envie de revoir l’utilitaire blanc et rouge remettre le cap sur les quartiers.
Tournée complète de la Camionnette d’alimentation générale culturelle ici.
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Avec le soutien du Conseil départemental et de l’Etat.