Créée en 1994 par Emmanuel Boudet, Laser Fusion fait le dos rond face aux turbulences pandémiques qui lui feront perdre un tiers de son chiffre d’affaires cette année. La PME de Coulanges-lès-Nevers compte sur son expertise reconnue de sous-traitante d’une galaxie de clients français et sur ses machines à la pointe (ardente) de la découpe au laser pour rebondir, comme elle avait su le faire après la crise de 2008.
Si les visites d’entreprise par les élus se déroulent le plus souvent dans un climat au beau fixe (inauguration, extension, anniversaire, etc.), celle qui a mené Denis Thuriot, président de Nevers Agglomération et maire de Nevers (1), dans les locaux de Laser Fusion avait le caractère plus réconfortant d’une rencontre bienvenue et d’une écoute attentive face au vent mauvais.
« Le Covid a fait son œuvre, nous sommes passés de 29 à 22 salariés », a expliqué à ses visiteurs Emmanuel Boudet, fondateur et patron de l’entreprise installée sur la zone d’activités des Champs-Hardis, en lisière de Coulanges-lès-Nevers. Le chiffre d’affaires 2020 a lui aussi subi les répercussions de la crise sanitaire et économique. « Nous serons à 2,7 M€, alors que nous étions à 4 M€ en 2019 », précise le chef d’entreprise, qui a souscrit un prêt garanti par l’Etat (PGE) de 1 M€ en guise de ballon d’oxygène en cas d’urgence : « Mais j’aimerais éviter de l’utiliser. »
Il en faut plus pour mazouter de morosité le moral d’Emmanuel Boudet, qui a toujours mené sa société avec le « bon sens paysan » revendiqué de ses racines morvandelles. Le diplômé en génie mécanique de l’IUT du Creusot avait eu le nez creux en se formant au soudage au laser pour étoffer son DUT. Après avoir travaillé trois ans chez LISA, une filiale de l’Aérospatiale implantée à Nevers, le natif de Blismes a créé Laser Fusion en janvier 1994, dans la zone industrielle de Nevers Saint-Eloi : « J’ai commencé tout seul, à 28 ans. La première année, j’ai fait 700 000 F de chiffre d’affaires, avec un résultat de 200 000 F. L’entreprise a toujours connu une croissance régulière. En bon Morvandiau, je ne dépense pas l’argent que je n’ai pas », expliquait-il il y a quelques mois, juste avant le premier confinement.
Cette sagesse terrienne lui a évité de plier lors des conséquences de la crise des subprimes, en 2008 : « Cette année-là , le chiffre d’affaires était de 3 M€. L’année suivante, il est descendu à 2 M€. J’ai réduit la voilure, et nous sommes remontés à 3 M€ en 2013. » Dans un domaine extrêmement concurrentiel, Laser Fusion s’est hissé parmi les « cinq à dix premières entreprises françaises » en renouvelant régulièrement ses machines – en 2011, 2015, 2017 et 2019. La dernière, achetée 750 000 € (2), a remplacé la doyenne de 2003, « la Rolls de l’époque » : « Elle est bien moins énergivore, elle est plus puissante et plus rapide. »
L’investissement a permis de réduire les coûts et de mieux répondre aux attentes des clients, une galaxie d’entreprises de la tôlerie, de la chaudronnerie, de la ferronnerie, de la mécanique et du bâtiment : « On a 6 000 clients en références, dont 2 000 actifs », expliquait Emmanuel Boudet avant la crise. « Notre plus gros client représente 3 % de notre chiffre d’affaires. » Ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, un autre pilier de la sagesse rustique sur lequel s’appuie l’histoire de Laser Fusion : « Dans notre métier, la réactivité, c’est le maître mot. Quand le devis est validé par le client, six jours après la commande arrive chez lui. Et quand c’est un client local, c’est encore plus rapide, il peut être livré dès le lendemain. »
Le quotidien de l’entreprise est rythmé par les demandes de devis et leur mise en œuvre : « On fait 3 500 pièces différentes chaque mois. 30 % des commandes, c’est de la pièce unique. 50 %, ce sont des commandes de moins de 50 pièces. » Chaque soir, 25 palettes et 50 petits colis quittent les bâtiments où l’entreprise a emménagé en 2003 – avec une extension en 2006. Avant la crise, Emmanuel Boudet envisageait un nouvel agrandissement. Ce n’est que partie remise, sans doute : « Le meilleur gestionnaire investit pendant la crise. »
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En compagnie de Céline Morini, 1ère adjointe à Nevers et conseillère communautaire, et de Fabrice Berger, maire de Challuy et vice-président de la communauté d’agglomération.
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Avec une aide de 20 000 € de Nevers Agglomération et une de 120 000 € au titre du FEDER (Fonds européen de développement régional).