Coiffeur depuis plus d’un quart de siècle à Nevers, Jean-Louis Morand a subi comme ses collègues une interruption totale d’activité pendant le confinement. Un nouveau coup dur après un an et demi de tensions sociales. Alors la reprise a été un soulagement, malgré les contraintes sanitaires et les affres du port du masque dix heures par jour.rturbante, on coiffait deux clients en une heure au lieu de trois. Il fallait le temps de reprendre les automatismes. »
La veille de la réouverture de son salon de la place Saint-Sébastien, le 12 mai, Jean-Louis Morand a retrouvé sa boutique, ses deux salariées, avec « un grand plaisir ». Et une urgence, une évidence : « On s’est coupé les cheveux mutuellement. Il y en avait besoin », sourit le gérant du salon Magnolia. Une façon de se « mettre en situation », dans un salon réaménagé au goût du jour sanitaire, pour aborder « sans panique » le flux des clients sevrés de câlins capillaires pendant deux mois – une éternité à l’échelle du bulbe.
Mais aussi une façon de dégager à coups de ciseaux un horizon bouché depuis le 16 mars. « Les quinze premiers jours du confinement, je les ai passés dans les démarches administratives, par mail », explique Jean-Louis Morand. « Heureusement, j’ai été très bien épaulé par la Chambre des métiers et de l’artisanat et mon syndicat, l’UNEC (Union nationale des entreprises de coiffure, NDLR). Je fais partie du bureau de l’UNEC 58, alors j’ai consacré une bonne partie de mon temps à répondre aux questions de mes collègues du département. »
Relayer les informations ne l’a pas empêché de ressasser son stress durant ces « deux mois sans chiffre d’affaires » qui prolongent une série noire : « Depuis un an et demi, entre la crise des Gilets jaunes et la mobilisation contre la réforme des retraites, les trésoreries sont à flux tendu. » Début mai, à l’approche du déconfinement, Jean-Louis Morand guette les fiches officielles qui dictent les contraintes sanitaires pour son « métier de contact » : « La stérilisation, le désinfectant, ce n’est pas un problème, l’hygiène est là en permanence chez nous. Ce qui a changé, c’est le nombre de clients, les gestes barrières. On a supprimé un fauteuil sur deux, et créé un sens de circulation. »
Le plus contraignant reste « le port du masque, dix heures par jour, qui vous colle des maux de tête ». Mais Jean-Louis Morand, blanchi sous le harnois de 27 années d’exercice à Nevers, ne se plaint pas : « On est tellement contents de revoir les clients, revoir du monde. Quand on a l’habitude de voir 25 personnes par jour dans son salon… Et puis on a eu la chance de reprendre, ce qui n’était pas le cas de nos collègues restaurateurs et cafetiers. » La chance, aussi, de compter sur une clientèle fidèle : « J’ai reçu beaucoup de messages pendant la fermeture, et les clients ont répondu présent à la réouverture. L’agenda était complet sur trois à cinq semaines. La première semaine a été un peu perturbante, on coiffait deux clients en une heure au lieu de trois. Il fallait le temps de reprendre les automatismes. »