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Il met sur la toile son âme et ses tripes, ses rêves et cauchemars. Autodidacte, fantasque, éruptif, Michel Philippart ne se revendique pas artiste mais « chercheur en art », animé par une fringale créatrice inassouvie depuis 55 ans. Mais son chef-d’œuvre reste la redécouverte de la chapelle Saint-Sylvain, dont il marie les fresques médiévales à des œuvres réalisées spécialement par de grands artistes contemporains.

Il offre à son visiteur des fascicules qui découpent en longues tranches sa production, de 1963 à 2017. De « vrais » catalogues d’artiste dans lesquels Michel Philippart commente, décode, explique ses périodes, les méandres et boucles de son cheminement artistique : « Je fais ces livres parce qu’on n’en fait pas sur moi », rigole-t-il. L’autodérision est en trompe-l’œil : « Jean Montchougny aimait ce que je faisais, il m’a même exposé en Suède », précise fièrement, et rapidement, le « chercheur en art », qui a loué avant l’été la galerie Belle de N pour exposer ses dernières œuvres – façon de contourner le dédain des galeristes.

Est-il artiste ? Michel Philippart balaie d’emblée la question : « il y a dix artistes par siècle. Ce sont ceux qui emploient quelque chose de nouveau, ceux qui laissent des traces indélébiles. Moi je fais partie des créateurs, des plasticiens, des chercheurs. Nous on cherche, alors que les artistes ont trouvé. » Parmi eux, il classe, « comme tout le monde », Van Gogh, l’un de ses chocs esthétiques primitifs, quand il découvrait les œuvres au collège dans les pages du dictionnaire Larousse ou des Lagarde et Michard.

Le natif de Haute-Saône plonge dans la peinture en 1963, à 17 ans. Fiévreusement : « C’était un moyen d’expression. Je suis autodidacte, ce qui m’a donné des lacunes mais aussi une grande autonomie : ma personnalité n’a pas été modifiée. » Sans complexes, il se fait la main en copiant des tableaux de maître, se goinfre de musées, de livres. Hors cadre, parallèle à sa vie d’enseignant qui le pose à Nevers en 1983, son besoin de créer suit un chemin singulier : « Peindre pour faire ce que les autres ont déjà fait, ça ne m’intéresse pas. Je suis fasciné par la conquête de l’espace depuis 1957, j’aime cette idée d’aller au-delà de ce qu’on sait faire, quitte à être dans l’erreur ou dans l’impasse. »

La stature des grands maîtres ne l’a jamais intimidé : « Je n’ai pas de complexe. Je cherche, je tente. Sur 600 tableaux, j’en ai peut-être dix qui sont réussis. Mais même sur une île déserte, je peindrais. J’éprouve tellement de plaisir à faire, à inventer. C’est une joie physique, tactile. Quand j’ai presque terminé un tableau, je ressens de la déception, car il n’est pas à la hauteur de ce que je voulais. Mais heureusement, dans les 24 heures qui suivent, j’en commence un autre. »

Sans filtre, Michel Philippart pose sur la toile – ou tout autre support, comme l’intérieur d’un vieux téléviseur – ses émotions en paquets, fantasmes, colères, peurs. Il y insère fréquemment son visage, « témoin du bordel du monde » et de son éternel recommencement. Pour l’exposition Jour / Nuit de la MCNA, la tragédie des migrants noyés en Méditerranée lui a inspiré une vaste toile peuplée d’objets, figurines, poupons en plastique sous les eaux : « Un tableau de fou », répétait-il lors du vernissage.

A défaut d’être né de ses mains, son chef-d’œuvre est issu de son esprit – et de celui de son épouse Jacqueline, inséparable complice : la chapelle Saint-Sylvain, joyau médiéval longtemps oublié, anonyme dans l’alignement de la rue Mademoiselle-Bourgeois. « On habitait la maison à côté. On louait la partie arrière de la chapelle comme garage, puis on l’a achetée. En démontant des cloisons, j’ai vu des peintures. Nous avons acheté la partie avant en 1999, et l’année suivante, nous avons découvert deux visages médiévaux. » Classé monument historique, l’édifice du XIIIe siècle dans lequel furent déposés les corps des ducs de Nevers avant leur inhumation fait l’objet de longs et patients travaux de réhabilitation : « C’est l’œuvre d’une vie. »

Le couple vit au rez-de-chaussée depuis 2009, avec vue sur l’étage où se côtoient les œuvres commandées à des artistes par Michel Philippart, au culot : « J’ai contacté ceux que j’aime, pour qu’ils fassent une œuvre spécifique pour le bâtiment, pérenne et gratuite. C’était une offre d’être humain à être humain. Un bon dossier. Le premier qui a accepté, c’est François Morellet ; il a fait deux vitraux dans sa vie, l’un est au Louvre, le second ici. Une porte s’est ouverte, et d’autres ont suivi. Aujourd’hui, il y a 25 œuvres, et plus de place. C’est un cabinet de curiosités unique. »

Avec son association, les Amis de la chapelle Saint-Sylvain, Michel Philippart organise quatre visites par mois : « On a le devoir de transmettre aux générations suivantes. Nous sommes dépositaires de cette chapelle, pas propriétaires. Notre but, c’est de partager. On le fait pour ceux qui ont vécu dans cette chapelle, des moines, des réfugiés espagnols, des gens modestes, qui ont autant d’importance à nos yeux que les ducs de Nevers. »

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